Filali Samad

Pour une stratégie nationale de développement de l’intelligence artificielle au Maroc

SAVOIR ET INFORMATION

Selon certaines études (1), environ 70% des entreprises adopteraient au moins un des types de technologies d'intelligence artificielle en 2030 (chatbot, système de recommandation,  ….), et près de la moitié des grandes entreprises utiliseraient la gamme complète des technologies d'IA dans leurs organisations.

375 millions de travailleurs, soit 14% de la main-d’œuvre mondiale, pourraient avoir besoin de changer de profession - et pratiquement tous les travailleurs devraient s’adapter à travailler aux côtés des machines d'une manière nouvelle.

L'IA pourrait potentiellement générer une production économique supplémentaire d'environ 13000 milliards de dollars d'ici 2030, stimulant le PIB mondial d’environ 1,2% par an.

Ces chiffres sont discutables mais la tendance est réelle et lourde.                            

L'IA offre de nouvelles opportunités dans tous les domaines : l’éducation, la santé, l’agriculture, la culture, l’industrie, la logistique, le droit, le divertissement, le cadre de vie (smart city, smart building, …) la transition énergétique etc …  

C’est pourquoi, le Maroc doit, sans tarder, mettre en place une stratégie nationale de développement de l’IA et en faire le fer de lance de sa transformation digitale.

Alors, compte tenu des forces et faiblesses du Maroc, quelles stratégies à adopter?

A mon avis, on doit aligner deux approches qui permettraient au Maroc de mieux propager ses actions et réformes, et surtout de développer une posture d’agilité nécessaire à tout projet de transformation numérique.

I) Approche top down

Elle consiste à voir ce qui se passe dans le monde, pour s'en inspirer mais surtout pour se connecter à toutes les initiatives, et inscrire sa stratégie dans des stratégies transnationales africaine et/ou nord-africaine pour mutualiser les ressources,  augmenter sa richesse en data et ouvrir des marchés. Un partenariat avancé avec l'Egypte et la Tunisie, qui s'élargirait par la suite à d'autres pays, serait un bon levier compte tenu des similarités et des complémentarités.

Cette approche amènerait à revoir une partie de la mission de la diplomatie marocaine. Cette dernière devrait alors jouer un rôle :

 - d'interface entre plusieurs acteurs : les centres de recherches, les centres de transferts de technologie, les universités, les institutions ...  ; 

- de fédérateur, catalyseur et mobilisateur des compétences de la diaspora pour contribuer au transfert de technologie. Elle peut jouer un rôle non négligeable dans la définition de cette stratégie; 

 - d’accompagnateur et boosteur de ces compétences pour accéder à des postes à responsabilité et élargir ainsi l’influence du Maroc.

II) Approche Bottom up :

Les leviers de développement de l'IA sont connus et tous les pays qui ont mis une stratégie nationale actionnent ces leviers.

Le Centre de Recherches pour le Développement International et Oxford Insights ont lancé l’« Indice de préparation du gouvernement à l’IA » pour mesurer l’état de préparation des pays à l’intelligence artificielle.

Cet indice repose sur 3 piliers :

- Gouvernement : Mesure la disposition du gouvernement à adopter l’IA, sa capacité à s’adapter et à innover ; 

- Technologie : Mesure la qualité du secteur technologique ; 

- Data et infrastructure : Mesure la disposition, la qualité, et la représentativité des données et l’infrastructure fournie et utilisée par les citoyens.

Chaque pilier développe un ensemble de dimensions et de sous-dimensions. Cet indice représente un tableau de bord pour suivre tous les indicateurs et élaborer des sous-stratégies pour améliorer chaque indicateur. Cet indice, en lui-même est une feuille de route pour le développement de l’IA.

Les atouts du Maroc :

Le Maroc s’est doté d’arsenal juridique et d’instances spécialisées en la matière telles que l’Agence du Développement du Digital (ADD), la Commission Nationale de Contrôle de la Protection des Données à Caractère Personnel (CNDP) et la Direction Générale de la Sécurité des Systèmes d’Information (DGSSI). Il a lancé un programme de recherche appliquée sur l’IA, possède un centre de calcul très important, etc … mais son véritable atout se sont les Marocains. Excellents en mathématiques, le coeur de l'IA, les étudiants marocains brillent aux concours des meilleures écoles d’ingénieurs françaises comme l’École polytechnique et CentraleSupélec. Ces étudiants doivent bénéficier d’un véritable suivi et de soutien.

 Le développement de l’IA ne doit pas non plus nous faire tomber dans un déterminisme ou un solutionnisme technologiques car certaines problématiques notamment la misère, les inégalités, l’exclusion, la répartition des richesses, resteront entières et dépendent de la volonté politique.

Fait, le 30/01/2022

Par : Abdessamad FILALI

Consultant  IA

 

  1.  : MGI-Notes-from-the-AI-frontier-Modeling-the-impact-of-AI-on-the-world-economy-September-2018
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